miércoles, marzo 11, 2009

Téléchargement illégal

Deux visions de la société s'opposent
par Nathaniel Herzberg

Il fleure ces jours-ci à l'Assemblée nationale un parfum oublié.
Le gouvernement propose, et l'opposition s'oppose.
Pas sur des questions de calendrier, de niveau d'engagement budgétaire, de nombre de postes de fonctionnaires ou d'éventail de peines substitutives à la prison. Non, avec le projet de loi création et Internet sur le téléchargement illégal, c'est un affrontement entre deux principes, deux visions du monde, qui s'impose.
Un face-à-face frontal comme on n'en avait pas connu depuis bien longtemps.

Au Parlement, les batailles d'idées qui animaient les travées se sont transformées en débat de curseur. L'économie de marché s'est imposée, comme sa nécessaire régulation. La cohabitation entre école publique et école privée ne fait plus discussion. La gauche s'est convertie à la sécurité, la droite à la protection de l'environnement. Il reste bien l'impôt sur la fortune, pour le symbole, les OGM ou encore l'homoparentalité. Mais, même sur ces terrains sensibles, les frontières s'adoucissent.

Avec le téléchargement, il se passe tout autre chose. Les sénateurs socialistes ont certes approuvé le texte en novembre 2008. Et au Palais-Bourbon, quelques députés de droite s'avouent peu satisfaits par le projet. Mais c'est précisément parce que plus qu'un parti pris idéologique, nourri d'histoire personnelle et de convictions intimes, ce projet impose un choix de société et un pari sur l'avenir. Sur la place d'Internet, sur le rôle de la loi, sur le financement de la culture et, d'abord, sur le sens même du téléchargement gratuit.

Le gouvernement, la majorité parlementaire, mais aussi les industries culturelles et l'essentiel des artistes défendent les droits des créateurs avec un principe : "Le piratage, c'est le vol." Pour l'ex-PDG de la Fnac mandaté par la ministre de la culture, "télécharger illégalement, c'est comme entrer dans une boulangerie et ressortir sans payer avec une baguette sous le bras".

En face, les députés socialistes, les associations d'internautes et de consommateurs rétorquent que, chez les jeunes, le téléchargement n'est pas l'exception mais la règle. "Demandez dans un amphi de fac qui n'a pas téléchargé, explique le député (PS) de la Nièvre. Pas un doigt ne se lève. La gratuité est devenue une des composantes de l'économie de la culture."

Mais comment, dès lors, financer la création ? Depuis six ans, en effet, le chiffre d'affaires de la production discographique a chuté de 50 %. Une major comme EMI France a vu ses effectifs fondre de 550 à 200 personnes. La faute au piratage, assure la profession. Le support physique est plombé et la filière numérique ne peut décoller. Comment dès lors demander aux producteurs d'investir dans de nouveaux talents ? "C'est l'exception culturelle qui est en danger si l'on ne réagit pas", dit-on chez Christine Albanel.

Là encore, les opposants retournent chaque argument. Ils mettent en avant les erreurs stratégiques de la filière, à commencer par le retard pris à proposer une offre en ligne digne de ce nom. "Ils sont d'abord restés collés au CD, n'ont pas cru au téléchargement, puis ont voulu mettre des verrous partout pour multiplier leurs profits, défend le responsable du collectif La Quadrature du Net. Ils se sont bloqués eux-mêmes."

Pour financer la culture sans entraver les échanges gratuits, les socialistes proposent une "contribution créative". Payée chaque mois par les internautes, elle serait redistribuée entre producteurs, éditeurs, auteurs et fournisseurs d'accès. Un dispositif qui laisse la profession sceptique, convaincue que jamais on ne dégagera des revenus équivalents. Et qui, de l'aveu même d'un de ses promoteurs au PS, ne s'applique pas au cinéma. Car, si produire un album et le distribuer en ligne peut se passer de grosse structure, il en est tout autrement d'un film. "Nous devons encore travailler la question, admet le député. Mais mieux vaut avoir des doutes que de se croire protégé par la ligne Maginot. Le mouvement est irréversible. Il en ira de cette loi comme de la précédente : la société la balaiera."

Car, là encore, deux visions d'Internet et de la loi s'affrontent. D'un côté, un nouveau mode de distribution de la musique et du cinéma, qui doit s'adapter aux droits fondamentaux, comme le droit d'auteur. De l'autre, une révolution technologique et sociétale qui impose de tout revoir. "La loi doit prendre en compte l'évolution de la société, pas ériger des digues, insiste Christian Paul. Elle doit permettre l'émergence de nouveaux modèles, pas les réprimer." "La société n'évolue pas sans règles, rétorque le rapporteur UMP du texte à l'Assemblée. Et c'est justement pour laisser aux nouveaux modèles le temps d'émerger que nous défendons ce texte."

Un débat fondamental - là, tout le monde est d'accord - qui embrasse deux des questions essentielles de l'époque : la démocratisation de la culture et le financement de la création.
Un débat que Christine Albanel voudrait "pédagogique". "Mais nous ne sommes pas d'accord sur la leçon à transmettre", sourit Christian Paul. Sur ce point, on peut lui donner raison.
Sur le reste, on l'aura compris, c'est affaire de philosophie.

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Je télécharge les oeuvres anciennes achetées, auteurs rémunérés, pour jouir légalement de mon achat quand le support du moment a disparu, s'est abimé ou est devenu obsolète.
J'ai payé l'auteur, je l'ai aimé, mais je ne le paierai pas plusieurs fois !
Par ailleurs, musique ou film sont à acheter en sourd et aveugle. Paye d'abord et tu jugeras après si ça t'a plus ou non, c'est ainsi ! On n'achète pas en aveugle, on goûte, écarte ce qui déplait, achète ce qui plait surtout en DVD. Le déchet à 95%.


Manuel
#363

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